Music for the planet
Les éditions 2023, 2024 et 2025 du Gstaad Menuhin Festival & Academy sont toutes placées sous le signe du «changement». Elles s'accompagnent de projets innovants tout droit sortis du laboratoire de Patricia Kopatchinskaja. Sous la bannière du cycle de concerts «Music for the Planet» sont présentés des programmes sous-tendus par des messages forts et marquants sur l'état de la nature, de l'humanité et de la société. Les genres et les styles y sont finement conjugués afin d'interpeler sur la situation du monde et offrir au final une expérience artistique à mille lieues du format standard des concerts classiques. Pour l'édition 2024, deux nouveaux concerts mettent en lumière – avec force musiques mais aussi textes et images – les différents visages que peut prendre cette transformation: «Venezia and Beyond» – ou quand la réalité visuelle d'une cité menacée par la montée des eaux dialogue avec quatre siècles de musique mis en vibration par les archets conjugués de la violoncelliste Anastasia Kobekina et des musiciennes et musiciens du Kammerorchester Basel – et la grande soirée «Temps et éternité» imaginée par Patricia Kopatchinskaja avec le concours de ses complices de la Camerata Bern et d'hommes d'église issus de différentes communautés religieuses du canton.
2024
Temps et éternité
À travers ce programme baptisé «Temps et éternité», Patricia Kopatchinskaja nous parle de ces instants où tout bascule, des catastrophes guerrières et de leurs conséquences, mais également d'espoir. Karl Amadeus Hartmann compose son Concerto funèbre en 1939 sous le coup de la révolte et du désespoir face aux atrocités de l'Etat nazi, qui menace d'anéantissement la civilisation européenne. Il peut être entendu comme une Passion exprimant ce qui a été et ce qui sera fait aux hommes, à toutes les créatures, à la création elle-même et, à travers elle, au créateur (à Dieu?). Dans son Polyptyque (un concerto pour violon composé en 1973 pour Yehudi Menuhin), Frank Martin a mis en sons la Passion du Christ d'après des images peintes par Duccio di Buoninsegna (ca. 1255-1319) sur «La Maestà», le célèbre retable du maître-autel de la cathédrale de Sienne: avec ce choix, il a opté pour le visage d'un Dieu compatissant envers la misère des mortels. D'après la croyance chrétienne, sa souffrance est synonyme de rédemption: une raison d'espérer en des temps bouleversés – d'y croire encore malgré le changements climatique? Pour accompagner cette puissante méditation, des hommes d'Eglise de la région bernoise issus des communautés catholique polonaise, juive et orthodoxe russe – des peuples qui ont tous, jadis, subi le joug de la barbarie nazie – réciteront de courts témoignages sur le sujet qui, à défaut d'être compris textuellement par le public, prendront sens par la présence même de leurs orateurs sur scène: le Kol Nidrei pour le cantor hébraïque, une prière pour le prêtre polonais et une évocation de la Résurrection pour le prêtre orthodoxe.
2024
Venezia and Beyond
Révélée par la série «Jeunes Etoiles» du samedi matin à la chapelle de Gstaad puis plébiscitée par le public lors du vote en ligne de l'été 2021 sur Gstaad Digital Festival, la violoncelliste russe Anastasia Kobekina fait désormais figure d'habituée du Gstaad Menuhin Festival & Academy. D'une sensibilité à fleur de peau, à l'aise dans tous les styles, cette disciple de Frans Helmerson se forme aujourd'hui au violoncelle baroque dans la classe de Kristin von der Goltz à Francfort. Et c'est justement avec un programme faisant dialoguer les époques qu'elle fait le voyage de Saanen en compagnie de Julia Schröder et de l'Orchestre de Chambre de Bâle: quatre siècles de musique de Barbara Strozzi à Caroline Shaw, en passant par l'incontournable Antonio Vivaldi et ses sublimes offrandes au violoncelle.
De quelle manière les concerts de ce cycle s'inscrivent-ils dans cette thématique de la transformation? Avec son programme «Venezia and Beyond», Anastasia Kobekina apporte une première réponse. Venise, ville de tous les désirs et de tous les rêves, berceau jadis de l'une des plus illustres traditions musicales, incarne en même temps la mort en tant que lieu d'abandon au destin et à ses forces incontrôlables. Sur le fil de son archet, au gré de notes à la fois anciennes et actuelles, la violoncelliste médite sur cette dualité: la carte postale d'un côté, l'éphémère de l'autre, symbolisée par cette cité au cœur d'une lagune menacée d'engloutissement par la montée du niveau des mers.
2023
De grandes œuvres pour la planète
Dans des témoignages vidéo, Patricia Kopatchinskaja démontre avec sa force de conviction naturelle combien le questionnement autour de la nature et de la société imprégnait déjà les grandes œuvres de Schubert, Beethoven ou Haydn. Elle y évoque de quelle manière les réflexions des compositeurs seront traduites sur scène au travers de performances audiovisuelles modernes lors des concerts «Les Adieux», «La Truite» et «Les sept dernières paroles» du cycle «Music for the Planet».
2023
«Les Adieux»
Avec «Les Adieux», Patricia Kopatchinskaja met en scène une lamentation scénico-musicale où l'on pleure notre planète en danger. Cela signifie, si les hommes continuent à se comporter comme ils l'ont fait jusqu'ici, prendre congé de la flore et de la faune, ces sources d'inspiration si puissantes et sonores qui ont été les premiers maîtres de la violoniste; et espérer tout de même que les objectifs fixés par les accords de Paris et l'agenda 2030 finiront tout de même par être pris au sérieux. Dans son programme, Kopatchinskaja conjugue la «Pastorale» de Beethoven et ses célèbres tableaux de nature avec des mouvements du Premier Concerto pour violon de Chostakovitch, du Concerto pour violon de Schumann, ainsi que de ses «Geistervariationen». En interaction avec le décor et les projections vidéo, une forme d'épée de Damoclès plane au-dessus de cette plainte désespérée, matérialisée par une vaste toile de lin transparente sur laquelle s'inscrivent les possibles prochains Adieux, Farwells et Abschiede.
2023
«La Truite»
Schubert a écrit son lied et son quintette avec piano sur la truite insidieusement capturée à partir d'un poèmede Christian Schubart – un écrivain qui a été traitreusement emprisonné en 1777 à son retour d'exil en raisonde ses idées révolutionnaires et retenu des années durant en captivité, dans l'isolement le plus total et avec interdiction de parler. À travers l'histoire de cette truite assassinée, il mettait en scène son propre destin. Nous autres gens d'aujourd'hui pouvons y voir le symbole de la nature maltraitée. Face à cette pauvre truite, Patricia Kopatchinskaja fait résonner une oeuvre nouvelle consacrée à la banquise, à ses habitants et au mal que leur cause le réchauffement climatique.
2023
«Les sept dernières paroles»
Les «Sept dernières paroles de notre Sauveur sur la Croix», l'une des oeuvres les ambitieuses de Haydn, se compose de sept Adagios avec introduction et Presto final. On y trouve «Vater, vergib ihnen, denn sie wissen nicht was sie tun», «Gott mein Gott, warum hast du mich verlassen», «Mich dürstet», ou encore «Es ist vollbracht»: ces mots du Christ transmis par les Evangiles constituent la réalité d'un nombre toujours plus grands d'êtres humains, d'animaux et de plantes – une Passion vécue également par la nature vivante… «In deine Hände, Herr, befehlen wir unseren Geist…»
2023
Exposition - Sedna
La légende millénaire de Sedna consiste à suivre des règles impératives pour survivre. Sedna, la souveraine de la mer respectée, redoutée et honorée, la mère des mammifères marins, punissait les humains qui se comportaient mal en gardant les mammifères marins dans ses cheveux jusqu'à ce qu'un chaman les peigne pour les libérer.
Aujourd'hui, les artistes représentent Sedna dans différents rôles : soit en aidant les humains à faire face à la montée des eaux due à la fonte des glaces, soit en les protégeant des conditions météorologiques extrêmes, soit sa vie est en danger en raison de la pollution et de la hausse des températures, provoquant la croissance des méduses toxiques à une taille énorme.
Lieu:
Blumen Stricker, Saanen
Horaires d'ouverture:
Vendredi 14 juillet 2023, 8h00 -12h00 & 13h30 -18h00
& pendant la cérémonie d'ouverture
Samedi 15 julliet, 8h00 - 12h00
Visites guidées par Martha et Peter Cerny:
Vendredi 14 juillet 2023, 17h00 et 17h30
Samedi 15 juillet 2023, 10h00 et 11h00
Deuxième exposition
Des objets en relation avec la légende de Sedna sont exposés à la chapelle Sainte-Anne de Saanen en marge du concert «Die Forelle». Mis à disposition par le musée Cerny.contemporary circumpolar art.
Horaire: jeudi 10 août 2023, 17h30–19h30& à l’issue du concert
2023
Table Ronde
Que peuvent faire les créateurs culturels dans le contexte du changement climatique ?
En ouverture de la série de concerts triennale "Music for the Planet", le Gstaad Menuhin Festival s'interroge sur la responsabilité des créateurs culturels, des musiciens et des musiciennes ainsi que sur le rôle des arts de la scène face au changement climatique. Suivez l'échange passionnant entre des artistes de haut niveau et des representant.e.s de la science et de l'activisme pour le climat.
La discussion aura lieu en allemand et sera enregistrée pour le Gstaad Digital Festival.
Invités à la table ronde : Marie Claire Graf (activiste pour la justice climatique), Patricia Kopatchinskaja (violoniste), Mirga Gražinytė-Tyla (chef d'orchestre), Angaangaq (chaman inuit - par message vidéo) et Dr Felix Keller (glaciologue).
Modérateur : Moritz Weber
A l'issue du concert «Les Adieux», Tente du Festival de Gstaad